Luisa a quitté son pays des rêves dans les yeux. Elle a tout laissé derrière elle, sa famille, ses amis mais aussi la misère, la faim, la guerre, l’oppression et la peur.
Elle a voyagé trois jours enfermée dans un container sans manger sans boire, entassée avec d’autres exilés comme elle.
Certains sont morts pendant le trajet, les plus faibles, mais Luisa a survécu, elle, elle veut vivre libre.
Quand elle a vu la grande ville, elle a eu le vertige, les grandes tours, les avenues bruyantes et tous ces gens qui marchent dans la rue, qui la croisent sans la voir. Le bonheur !
Elle travaille dans une société de nettoyage, elle ne gagne presque rien car elle paye les passeurs qui l’ont aidée à trouver la liberté.
C’est vrai que pour l’instant, il faut qu’elle fasse attention, elle n’est pas déclarée, on lui a expliqué, elle a bien compris, ça ne durera pas, quelques années de clandestinité tout au plus. Mais pour le moment, elle doit baisser les yeux, ne pas se faire remarquer, être une ombre au milieu des vivants.
Elle peine un peu en ce moment car elle porte en elle le fruit de son amour pour Nacho. Ses compagnes de misère lui disent qu’elle doit arrêter de travailler si dur, qu’elle est trop faible, trop fatiguée, que l’enfant va bientôt naître.
Mais il faut vivre, il faut payer le taudis qu’ils habitent.
C’est pour ça qu’elle a serré les dents, quand cette douleur lui a déchiré le ventre, emportant avec elle la petite vie qui poussait dans son corps.