Sylvie épluchait des carottes. Il paraît que cela rend aimable ; quand on les mange, peut-être, quand on les épluche, rien n’est moins sûr. Elle était cependant d’humeur guillerette. Elle avait briqué toute la matinée et s’accordait quelques minutes de repos, en épluchant ses carottes. Midi trente-cinq, Alain n’allait pas tarder à rentrer. Un bruit de clés et le visage renfrogné d’Alain apparut dans l’embrasure de la porte. Qu’est-ce qu’on bouffe ? Elle n’eut pas le temps de répondre. Putain, des carottes ! Y’en a marre des carottes et puis, au prix où elles sont ces jours-ci, il faut vraiment être con pour acheter des carottes. Sylvie le regardait bouche bée. Ces carottes viennent du potager de ma mère, lui rétorqua-t-elle un ton calme. M’en fou, y’en a marre de bouffer des carottes j’aurais dû aller à la pizzeria avec les collègues.
Les carottes c’est pour ce soir, le repas de midi est dans le four, ton plat préféré.
Ouais, de toute façon, je n’ai pas très faim.
Sylvie se leva, manifestement dégoûtée. Elle alla laver le couteau à éplucher, soigneusement.
Une larme perlait.
Se retournant, elle planta le couteau dans la carotide de son cher mari. Sale con, lui dit-elle sans hausser le ton.
Maintenant, elle regarde Alain qui fini d’agonir, le carrelage est inondé de son sang. Ca pisse une carotide. Un peu plus loin, des traces de pas boueux sur le plancher. Elle retire le couteau, le lave et retourne éplucher ses carottes. Tout ira mieux ce soir.
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Le fil en trop pique.
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Méfions nous des esprits trop ronds, de ceux qui, pas une parole plus haute que l’autre, semblent s’accommoder de tout. Rien ne vaut parfois une petite saute d’humeur, soupape de notre mal être.
Ce petit texte proposé en tant que Fulgure sur un autre site. histoire de détendre l’atmosphère. Et de donner de bonnes idées aux gens un peu coincés...