Le vieux Victor était un grand gaillard bien typique de nos contrées d’Auvergne. Visage bien marqué par un avinage profond, il vivait seul tout là haut dans un hameau aux bâtisses usées par le vent, la pluie et la neige.
Il avait pour voisine, sa pire ennemie : La Toinette Pouzadoux.
Fallait y’aller là haut, pas de route, deux simples sillons de terre avec au centre les herbes folles qui n’en finissaient pas de pousser. Le facteur passait de temps en temps pour déposer "La Montagne" dans la boîte aux lettres du père Victor et plus rarement pour amener la retraite des vieux à la Toinette.
Alors on ouvrait des bouteilles de ce bon vieux vin vert dont le raisin mûrissait dans la vallée de Sioule. Une, puis deux, voire trois. Lorsque le postier titubant sur sa bicyclette reprenait la route du village, la guérilla reprenait entre les voisins échauffés.
Le Victor retournait faire "un tour" dans sa cave. Ca se terminait au soir dans un boucan incroyable de bouteilles brisées et de miaulements effrayés.
Cré Diou, Toinette, quand on a un chat aussi noir, on lui fout une lanterne au cul !
Et de l’autre coté du mur :
Qué cara ! (quelle chèvre !).Votré tioul di lou vindé, limi di lou lé !!(Tes fesses dans le vin, les miennes dans le lit)
Et le silence revenait. Au bout de quelques heures seulement, deux yeux verts un peu inquiets redescendaient de l’arbre.