Mon corps repose ce matin. Les aiguilles du temps semblent écartelées, leur compas invisible arrêté dans mon crâne . Creuser mentalement les échos de la nuit passée.
Pourquoi soudain semblai-je ne plus avoir de mémoire ? Ou si peu que..
Hier les draps étaient blancs et doux, Aujourd’hui je ressens sur ma peau leurs efforts de pierre pour me recouvrir, leur reptation ténue mais précise qui centimètre par centimètre glisse, retombe, remonte, s’acharne..
L’épouvante me disloque. Où est mon bras ? mon pied ? En haut en bas , tout s’échappe. Et se mélange..
Si encore je pouvais ouvrir les paupières et laisser s’enfuir contre le mur ces scintillements qui explosent et dardent le fond de la prunelle. Si je pouvais en les frottant le plus longtemps possible effacer les damiers rougeoyants qui semblent se coller à la peau, glisser pour laisser un souvenir grimaçant et la place à d’autres dessins, en spirales, en étoiles, en..
Noir brisé
De zébrures
Acérées les tessons
Se collent sous ma peau
Est-ce ainsi... le dernier ?
Ou bien ai-je dans la nuit entrepris un voyage dans une marge du monde ?
Les oreilles battent le sang comme un bateau au loin sur l’horizon découpe ses allers et retours derrière la vague immobile..
Les draps ont terminé de me vêtir de leurs écailles. Je les ai senti d’abord envelopper mes pieds, puis les mollets, s’attarder aux hanches comme une dernière caresse à ce corps qui a aimé que des mains promenades hantent ses vallons.
Suis-je en train de me métamorphoser en une sorte de sirène, ou bien une momie ?
Mes yeux s’ouvrent enfin, mais le noir que je perçois immédiatement est celui de mon vide. La pénombre ne veut plus être de mes amies. La pénombre se terre, elle a peur de me dire. Elle cache sa face derrière ses deux bras immenses comme l’hiver,
Et le froid me saisit ,
Et le froid me saisit..
Et je me sens froissée jusqu’au cœur de mes os.
Est ce ainsi... le dernier ?
Et les draps qui s’enroulent
Achèvent leur travail
Embaumement glacé
Leurs paumes sont si douces
Ils ont su retrouver
Le chemin de mes pentes en fuites.
Sculpteurs du définitif,
Je ne suis que matière à leur ultime besogne.
Est-ce ainsi le dernier.. sommeil ?