I il est 20 heures,
Dans la chambre 222, la lumière clignote au-dessus du lit ;
Babeth est allongée sur le dos, la tête légèrement tournée vers la droite ; elle dort .Cependant, un roulement de tambour, des patins qui roulent sur le pavé, un sac de billes qui se rompt au sol, des voitures qui se tamponnent, des cris d’enfants qui se chamaillent, de joyeux drilles qui chantonnent en sortant du bistro, des pétards qui éclatent sous la fenêtre : la nuit de Babeth est agitée ;
22 h,
Elle se tourne maintenant, soupire, gonfle son sein, sa respiration est saccadée ; elle presse ses mains sur ses oreilles et son visage se crispe ; le tocsin envahi son corps, des canonnades l’assourdissent ; elle voit des quartiers détruits : seuls quelques pans de mur laissent apercevoir les vestiges récents de la vie : une cage vide, l’aile d’un oiseau accrochée aux barreaux , un matelas souillé, un chien ensanglanté, des décombres entassés ;
Babeth se débat dans un univers douloureux.
Minuit :
La couverture enchevêtrée autour de ses jambes, Babeth a roulé au pied de son lit ; la lampe de chevet pend à son fil ;
Dans la chambre 222, une poche de glace a glissé au sol ; la lumière ne clignote plus au dessus du lit ;
La porte s’ouvre, un instant, un large sourire éclaire le visage d’une femme en blanc, pour s’éteindre aussitôt ; elle se précipite, soulève sa tête, observe son visage, ouvre rapidement ses paupières, la pause doucement au sol et court vers la sortie ;
Un peu plus tard,
un brancard, un drap, le tournoiement des hélices d’un hélico sur un toit : Babeth s’est envolée.