Assis à une table devant un jus d’orange auquel il n’a pas touché, il est là imperturbable de solitude glacée. Rien ne paraît troubler la gravité de ses pensées, ni les deux enfants qui se poursuivent entre les clients ni cette jolie blonde avec ses amies qui ne cesse de le dévisager.
C’est vrai qu’il est plutôt beau garçon : les cheveux bruns, la peau mate et de magnifiques yeux bleus dans lesquels on aimerait se perdre. Mais pour le moment il reste là impénétrable et lointain, dernier survivant sur une terre atomisée.
Il glisse la main dans la poche de son pantalon, en sort un billet, le pose sur la table, se lève et traverse absent le trottoir inondé de lumière. Il fait quelques mètres, prend l’escalier du métro et se retrouve sur le quai de la station. L’odeur de cette multitude bruyante lui lève le cœur, le brouhaha, les voix, le bruit de la rame qui s’approche, tout ce qui l’entoure lui tourne la tête, tout se mêle, visages inconnus et visages familiers, la peur, l’angoisse, la terreur.
Il fait un pas en avant....arrêt sur image...plus rien.
La foule s’est tue.
Dans le micro une voix s’élève alors : « Mesdames et Messieurs, en raison d’un incident voyageur... »