Je ne suis plus cet animal blessé ramassé par hasard sur le bord d’un chemin, ni cette bouche muette que les larmes ont fermée. Je ne suis plus cette douleur étouffée s’enfermant de silence, ni cette angoisse feutrée emportée dans un rire.
Je ne suis plus cet ange aux ailes brisées, trébuchant sur les sables trop fins des falaises crénelées ni cette vague se morcelant en myriade de soleils sur les rochers trop noirs d’un désespoir plus grand que mon amour.
Je ne suis plus celle que tu voulais, soumise et mesurée, obéissant à ta loi, dressée comme un cheval docile.
Je suis un poing levé contre vents et marées, je suis cette goutte de sang que la vie a versée et cette larme séchée sur un visage trop pâle. Je suis ce regard transparent où se noient peines et chagrins, plaie ouverte des blessures infligées à ceux qui ont trop souffert.
Je suis le vent du nord que la colère ressuscite ou brise marine au cœur mouillé d’embruns. Je suis bise glacée sur les steppes abandonnées ou vent du désert asséchant les oueds.
Pour le mal que je porte en moi et qui coule dans mes veines, pour tes silences, j’ai barricadé mon âme et fais taire mon cœur.
Je ne suis plus celle que tu croyais aimer…