Quoi de plus haïssable pour l’homme de raison
Que la nature elle-même, ensorcelant poison
Qui dévore ses fils, détruit ses créations ?
Madame Nature, je hais jusqu’à ton nom.
On l’appelle notre mère, et nous sommes sentients
A l’opposé du roc. Serions-nous inconscients
D’aduler le monstre qui crée et puis défait
L’esprit, la connaissance et l’âme des parfaits ?
J’invective les astres et crache sur la Terre
Je ne peux accepter ce chemin de misère
Qui est la seule option d’une vie de hasard.
Quand survient la naissance, il est déjà trop tard.
Je ne veux, ni ne peux, louer cette nature
Et je refuse aux dieux de n’être que pâture
D’animaux inférieurs dévoreurs de passions
Alors que j’ai l’esprit et la compréhension.
A quoi sert une âme ? Cette belle conscience
Qui confère à l’humain tous les fruits de sa science
Qui fait de l’homme un dieu aux ouvrages inouïs
Mais rejette aussitôt sa trace dans l’oubli.
Pourquoi tâter des sens et toujours les subir
Le massacre gratuit n’est pas même le pire,
De la haine des hommes aux pires cataclysmes
L’abjecte destinée est objet de lyrisme.
Conflits, catastrophes, tueries, tsunamis.
Les chantres religieux, et leurs princes amis
Mènent l’apologie de cette souveraine.
L’horreur est exaltée dans la pensée humaine.
Hasard, nécessité, fut posée la question.
D’autres réponses sont la justification ;
Un accident fortuit, une erreur manifeste
D’un créateur dément, insouciant de son geste.
Simple phénomène sans plus d’explication
Accident aberrant. fosse de création,
Les matériaux premiers joints par la mécanique
Formant la nouveauté, le code génétique.
L’erreur ainsi conçue nous est indéchiffrable
Il nous reste à prouver que nous sommes capables
De forcer, de violer la nature funeste,
La gageure ultime ; au poète le reste.
Mai 2005