Un petit col roulé sous un long cou pelé
Un gros bec recourbé, un crâne dégarni
Un oeil bien trop brillant, un plumage fort laid,
Voilà mon vieil ami, vautour d’Abyssinie.
Le rapace se dandine sur la carcasse
D’un vieux buffle crevé, dans une puanteur
Immonde qu’amplifie une chaleur tenace.
L’affreux volatile est parangon de laideur.
Trois hyènes attirées par l’odeur de charogne
S’approchent de l’oiseau qui sautille en retrait.
Laissant la place libre aux animaux qui grognent,
Il vole des morceaux sur la bête éventrée.
Un rugissement dans la savane assoupie,
Sa majesté le lion veut sa part du festin.
Entouré de sa cour, la crinière en épi,
Le seigneur, de la voix, chasse les importuns.
N’ayant pas d’illusion sur le grand suzerain,
Le vautour s’envole d’un seul battement d’aile.
Le mannequin d’horreur se mue en souverain,
Et montre dans les airs une grâce irréelle.
Les ailes déployées il glisse dans les cieux
Et dessine au dessus des dunes du désert
Les lentes volutes d’un ballet silencieux
Qui émerveille tous les amoureux des airs.