Au large du François poussée par l’alizé
Se coure une régate, au milieu des risées.
Douze yoles de bois, aux misaines carrées,
Sur l’onde délicate affrontent la marée.
Tunique d’Arlequin qu’éparpille la mer,
Les voiles des gommiers, dissipées et légères,
En tourbillon marin se poursuivent, se croisent
En quête de lauriers sur l’océan turquoise.
Les esquifs colorés rivalisent d’audace,
Menés par des pêcheurs obstinés et pugnaces
Qui veulent honorer le pavillon d’un port,
Masqué sous les couleurs de leur riche sponsort.
Un patron impatient, au sein de la bataille
Se débat en grognant sur son grand gouvernail.
Il méprise l’avis de ses deux « premiers corde »
Pour mener son navire au devant de la horde.
Lorsqu’un fourbe clapot d’une courte ruade
Projette un matelot au milieu de la rade,
Le patron dépité a perdu sa faconde.
Il paiera sa tournée ce soir en bière blonde.
Le soleil au couchant nimbe les yoles rondes,
De halos rubescents qui reflètent sur l’onde
Des poussières de feu balayées par Eole,
De son souffle nerveux aux fragrances créoles.