Une étrange douceur baignait ce soir la grève,
La lune au ras des flots jouait avec les vagues,
Tes cheveux se prenaient à imiter les algues.
Etais-tu auprès de moi ou bien n’étais-ce que rêve ?
J’avais créé pour toi tout un monde invisible,
Dessiné des palais, inventé l’impossible,
Ressuscité l’amour, éloigné le mensonge.
Etais-tu auprès de moi ou bien n’étais-ce que songe ?
J’avais éteint pour toi jusqu’aux feux du couchant
Pour que s’avance l’ombre et le délire ardent.
Je te parlais la nuit sur les ailes du vent.
Etais-ce vraiment ta voix ou l’écho de ton chant ?
Je te disais que les heures n’avaient plus d’importance,
Que les malheurs du temps garderaient leurs distances,
Que les fruits à venir auraient le goût du miel.
M’avais-tu abandonné et pourquoi tout ce fiel ?
Quand les bras se dénouent, bien des serments s’enfuient.
Sur les galets du lit, le ruisseau se serait-il tari ?
Pourtant un éclair luit et je pris le pari
Que l’orage à venir saurait remplir les puits.
Une tendre lueur éclaire les heures de trêve,
La lune à son zénith joue avec les nuages,
Ton souffle régulier du temps tourne les pages,
Tu dors auprès de moi et ce n’est pas un rêve.