Le 30 Novembre 1990 était un vendredi !
Ce soir là, après la journée passée à l’Escadrille, j’avais disputé un match de tennis face à un collègue de la Mission d’Aide Militaire à laquelle j’appartenais également depuis un peu plus d’un an…
Non, je ne me souviens pas du résultat !
Nous étions donc à N’Djamena où depuis quelques semaines couraient des rumeurs comme quoi à la frontière soudanaise il se préparait quelque chose contre le pouvoir en place, c’est à dire contre le Président Hissène Habré, son gouvernement et tous ceux qui lui étaient fidèles depuis sa prise de pouvoir quelques années plus tôt. Au sein de l’armée française, et plus particulièrement parmi les Troupes de marine, on ne le portait pas dans son cœur car personne n’avait oublié le Commandant Galopin froidement assassiné sur ordre de ce même Habré, à l’époque chef de la rébellion Toubou.
Le commandant Galopin avait été envoyé au Tibesti pour négocier la libération de Madame Claustre, une archéologue française prisonnière de ces rebelles depuis plusieurs mois.
La négociation se termina par l’exécution de l’officier français… et madame Françoise Claustre ne sera libérée qu’en 1977 par l’intermédiaire des Libyens. Mais ceci est une autre histoire…
Ce soir là mon épouse et moi-même nous sommes couchés paisiblement dans ce même bungalow que nous avions déjà occupé durant deux ans, de fin 1965 à fin 1967…
Une nuit de courte durée car vers 5 heures du matin on tambourina aux volets…
« Rassemblement, tenue de combat ! »…
C’est ainsi que cinq minutes plus tard notre patron, le Colonel Mariani, dit aussi le PPCM, soit le Plus Petit Colonel de Marine, nous apprit que Habré et ses acolytes avaient vidé les banques dans la nuit avant de fuir la capitale soit en avion, soit par la route et le pont de Chagoua direction le Cameroun voisin…
Nos consignes étaient simples… Protection de la population civile, toutes nationalités confondues, mais sans intervention directe sauf
cas de légitime défense si les militaires tchadiens susceptibles d’être encore sur place se manifestaient d’une manière belliqueuse…
Toute la journée du samedi 1er Décembre la population prit sa revanche sur le Pouvoir en fuite, emportant tout ce qui pouvait l’être, de la Présidence comme de l’hôpital central, dit de référence, en passant par les villas de ceux qui avaient fui la vindicte populaire mais aussi en pénétrant dans les casernes où les dépôts d’armes et de munitions se vidèrent rapidement...
Il faudra attendre le lendemain, le dimanche 2 Décembre, pour voir arriver en provenance du Soudan la première colonne armée des Forces d’ Idriss Deby, colonne qui immobilisa notre 4X4 face au Novotel alors que nous tentions, en compagnie de deux collègues, de rallier la Base aérienne pour une mission de ravitaillement … Par chance ce jour là j’avais avec moi mon appareil photos, un EOS Canon ancienne génération, avec lequel, après avoir obtenu l’accord des hommes de Deby, je fis ces quelques clichés sans imaginer qu’ils me permettraient d’illustrer mes propos trente années plus tard…
En quelques jours les nouveaux arrivants rétabliront le calme et l’ordre, a priori sans violences, tandis que sur ordre de l’ambassade, et sans doute un peu précipitamment, les Forces françaises présentes sur le territoire assuraient l’évacuation de plus de deux mille civils vers la France… à l’exception de quelques épouses de militaires dont ma femme qui obtinrent l’autorisation de rester sur place.
J’ai beaucoup de mal à réaliser que trente ans se sont écoulés depuis cette époque... Quoi qu’il en soit cinq ans plus tard je retrouverai le Tchad mais cette fois le Sud et les pistes cotonnières… Les plus belles années de ma vie je les aurai passées dans ce pays !
A chacun son histoire, à chacun son destin…
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