La pâte est lourde, ardente.
Alors il roule le sable en fusion dans le natron d’Egypte dégageant une fumée âcre comme dans la clepsydre de Satan. Quelque peu d’antimoine et de poudre de cobalt pour la couleur et l’homme se met à rouler la boule de feu au bout de la canne à souffler.
Mille degrés, par un de plus, pas un de moins.
Ainsi il souffle la paraison en gonflant les joues comme un trompettiste de jazz noyé dans les fumées d’un pub de Brooklyn, et la bulle bleue s’étire.
Comme le battant de l’horloge il bat le temps de gauche à droite déformant le pâton qui s’allonge en prenant doucement la forme souhaitée ! Et le sable dans le sablier et le battant de l’horloge cessent de vivre, le temps semble suspendu au bout de ses lèvres.
La tenaille emprisonne irrémédiablement la silice rouge et jaune, l’homme étire la lave incandescente bien vite déposée et tournée sur le bois.
Il souffle encore, il sue, il aspire toute la beauté, il expire toutes les vapeurs diaboliques, il se crève, il s’use.
La rosée humaine rime la peau et le maillot.
Au bout le feu assèche la gorge mais il continue.
Enfin l’objet de verre a pris corps dans l’arche de recuis, emprisonnant à tout jamais une multitude de petites bulles infimes éclats d’âme du souffleur de verre.